Pascal Nègre, président d’Universal Music France, Italie, Moyen-Orient et Afrique, nommé en janvier à la tête des activités « new business » d’Universal Music Group, a activement participé à une réflexion de fond sur une nouvelle définition des médias à l’ère de la numérisation.

Un ensemble d’experts s’interrogent sur la fonction éditoriale dans leurs métiers respectifs, qu’il s’agisse de la musique, du cinéma ou du livre, alors que la dématérialisation bouleverse les anciens équilibres. Leurs contributions sont rassemblées dans un livre passionnant, « Protocoles éditoriaux », qui parait cette semaine. Réalisé sous la direction d’Olivier Bomsel, professeur à ParisTech, le livre interroge des historiens européens et américains, un assyriologue reconnu et grand spécialiste de l’histoire de l’écriture (Jean-Jacques Glassner), un expert de l’économie de la propriété intellectuelle (Yann Ménière) ou encore un philosophe, théoricien du théâtre, metteur en scène et acteur (François Regnault).

Dans un long entretien que publie ce livre, Pascal Nègre explique son métier et son rôle de producteur, « quand la création devient professionnelle ». Il souligne l’importance du travail de médiatisation. « J’insiste : l’artiste est impliqué du début à la fin. (…) Il ne faut pas croire que c’est la firme qui médiatise l’artiste, lequel ne serait qu’un produit inerte. L’artiste est, de lui-même, au cœur de la médiatisation. »

A l’ère de la dématérialisation, l’album reste le « cadre » de référence de la musique, souligne Pascal Nègre. « La progression du chiffre d’affaires d’iTunes aujourd’hui porte essentiellement sur la vente d’albums, alors qu’on nous annonçait, il y a dix ans, qu’on ne vendrait que des titres, que les albums étaient condamnés. Le cadre, c’est l’album. » L’album, c’est « l’univers de l’artiste ».

La diffusion de la musique en streaming ne change pas cette donne, on continue à écouter des albums, mais à cela s’ajoutent les playlists, qui correspondent aux compilations dans le marché physique. « Aujourd’hui, on s’abonne à un service pour avoir accès à sept, huit, quatorze millions de titres – en payant l’accès à une base de données -, et on utilise des applications qui vont les éditorialiser. (…) On a un rôle à jouer dans les applications. Au fond, c’est le rôle qu’on tient aujourd’hui. Quand on achète une compilation, c’est qu’on l’a éditorialisée. Nous continuerons à faire ce travail, mais sous forme d’applications. La question est stratégique : faut-il posséder des plateformes ou faut-il travailler à développer des applications ? », s’interroge encore Pascal Nègre.

L’interview aborde toute une série d’autres sujets, dont celui du temps mondialisé, de la diversité culturelle (« Pour moi, la diversité, c’est qu’il y ait plus de succès. Plus d’artistes qui vont rencontrer un public »), les singularités linguistiques.