Paris, le 15 juillet 2011

L’Europe numérique : choix et enjeux
Par Jean-Bernard Levy, René Obermann et Ben Verwaayen*

Si l’Europe veut conserver sa compétitivité et sa place de précurseur et de leader dans les secteurs de la technologie, du multimédia et des télécoms, elle doit se doter de la meilleure infrastructure numérique possible. Comme l’a évoqué Neelie Kroes, la commissaire européenne en charge du numérique et des communications, l’opération implique de gros investissements. L’enjeu : un accroissement de la capacité industrielle et, surtout, un « Internet à la carte ».

Mercredi, lors d’une réunion avec Madame Kroes, nous avons présenté une approche inédite pour faire face à l’explosion de la demande de connectivité numérique et du trafic de données.

Le trafic de données Internet sur les réseaux fixes progresse de 35 % par an quand celui qui transite sur les réseaux mobiles bondit de plus de 100 %.

Si nous échouons à fournir la connectivité nécessaire pour accéder aux services numériques, les conséquences pour l’Europe seront désastreuses. Les réseaux haut débit sont des vecteurs clés de création d’emplois, d’innovation et de croissance. Les consommateurs et les entreprises auront besoin de connexions toujours plus rapides. L’enjeu est donc la compétitivité de l’Europe et elle vaut bien qu’on se batte pour elle.

Les objectifs du Digital agenda sont extrêmement ambitieux. Tous les Européens doivent avoir accès au haut débit de base d’ici à 2013 et à des vitesses de 30 Mbits/s en 2020. D’ici là également, plus de la moitié des ménages s’abonneront à un service haut débit supérieur à 100 Mbits/s.

Certains critiquent déjà ces objectifs, les jugeant trop ambitieux et peut-être trop influencés par certaines préférences technologiques. Les objectifs de 2020 ne seront atteignables que s’ils s’appuient sur des modèles économiques durables et une exploitation plus efficace de ressources rares. Un modèle basé uniquement sur le prix ne pourra en aucun cas renforcer la compétitivité. Nous voulons un marché juste, où tous ceux qui travaillent dans le secteur de l’Internet (ou autour) auront la certitude que celui-ci aura un développement pérenne. C’est ce que nous appelons un « Internet à la carte ».

Seules les entreprises en bonne santé, capables et prêtes à investir massivement, seront en mesure de déployer les réseaux à haute vitesse qui offriront ce choix. La Commission européenne estime que le déploiement du haut débit dans tous les foyers européens exigera des investissements de l’ordre de 180 à 270 milliards d’euros. Le financement public peut jouer un rôle majeur dans les régions où, sans lui, le déploiement de réseaux d’accès de nouvelle génération serait impossible, mais une chose est claire : le financement des investissements doit provenir en majorité du secteur privé, et principalement des opérateurs télécoms.

Pour surmonter les difficultés auxquelles elle est confrontée, l’Europe a besoin d’un cadre juridique global et coercitif, mais aussi suffisamment flexible pour s’adapter aux exigences locales et favoriser l’innovation et l’investissement. Le secteur, les décideurs et les consommateurs s’accordent à dire que la suite de la success story de l’Internet dépendra largement du déploiement en temps voulu des réseaux mobiles et fixes de nouvelle génération. De même, si le pas ne s’intensifie pas, l’Europe risque de perdre du terrain au profit des Etats-Unis et de certaines zones d’Asie-Pacifique, et les conséquences sur la compétitivité globale du Vieux Continent ne se feront pas attendre.

Il est capital que le futur cadre réunisse les conditions adéquates pour le déploiement de réseaux haut débit et l’élimination des obstacles à l’investissement. Il s’agit de promouvoir un « internet à la carte », fondé sur des conditions nationales voire régionales, permettant aux fournisseurs de proposer des offres différenciées et d’encourager le co-investissement dans les zones non –concurrentielles. Réduire le coût des travaux de génie civil et du câblage à l’intérieur des habitations faciliterait certainement le déploiement dans tous les foyers ; et il faudrait par ailleurs définir des standards ouverts et interopérables afin d’obtenir une symbiose de la qualité de service sur IP.

Dans la création de l’Internet à la carte, l’Europe doit emmener le mouvement et non le suivre. Elle doit promouvoir activement l’établissement d’un marché de services gérés dynamique sur lequel les fournisseurs de contenus, d’applications et de services pourront offrir une expérience utilisateur enrichie.

Nous soutenons la politique de la commissaire européenne Neelie Kroes. Notre secteur est prêt à prendre des responsabilités et à faire les choix d’investissement nécessaires pour aider l’Europe à asseoir sa position dans le monde et à offrir à ses citoyens un Internet haut débit ouvert et accessible à tous.

  • Les auteurs sont le Président du Directoire de Vivendi et les directeurs généraux de Deutsche Telekom et d’Alcatel-Lucent, que la commissaire européenne Neelie Kroes a invités à présider conjointement un groupe de travail.

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